jeudi 12 avril 2007

Plan drague.

Boite de nuit. Bord de route nationale. Samedi soir. Ou plutôt dimanche matin. Ça sent la vodka orange. Sur la piste un couple. Au début de la soirée ils s’évitaient, faisaient semblant. Puis ils se sont caressé les mains. Se sont jaugés, les yeux dans les yeux. L’instant est stratégique. Bientôt quatre heures. Il faut conclure comme disait Jean-Claude Dusse.
Ils n’ont pas le même âge. Ils n’ont pas fréquenté les mêmes bancs d’école. N’ont pas les mêmes origines.
Sardou chante « Ne m’appelez plus jamais France ». Leurs yeux brillent. Ils aiment Sardou et aussi Enrico Macias ; « Les gens du Nord » plutôt « Qu’enfants de tous pays ». L’ancien instituteur d’Algérie roucoule. C’est pour eux. Une main s’approche d’une nuque. Caresse. Un pouce sur deux lèvres. Corps à corps. Ça sent l’estocade chère à Guy Bedos et Sophie Daumier. Ils parlent maintenant le même langage. Font semblant de se chamailler pour mieux se retrouver. Ils se cherchent, ils se trouvent. Bientôt la fin du slow. L’un mène, et ce n’est pas celui auquel on pense, l’autre suit.
Ils s’embrassent. Sur la bouche.
Ce matin Nico et JM vont coucher ensemble.
C’était sûrement inné.
Tout à l’heure il y a la messe.
Puis il faut aller voter.
On est le dimanche 22 avril.




Il y a 10 ans
Samedi, 12 avril 1997.
Cosmopolis

S’il on interrogeait les français sur leur culture cinématographique, les trois-quarts vous répondrait: « Oui j’ai vu Métropolis ». Même moi je m’y ferais prendre car à force d’en avoir vu toujours les mêmes extraits, on finit par se persuader l’avoir vu en intégralité. D’ailleurs le phénomène est le même pour tous ces chefs-d’œuvre avant-gardistes qu’il faudrait avoir vu ou lu mais à côté desquels on est passé pour cause de flemme.
Aujourd’hui j’ai vu, non pas un film, mais la réalité d’une ville aux antipodes de la vision pessimiste de Fritz Lang.
Une ville où un indien discute fringues avec une fille à l’accent italien et au nombril percé. Une ville où un black très rasta répond à son téléphone mobile sur son VTT. Une ville où des garçons vendent du rouge à lèvres à des filles qui, elles, vendent des voitures. Une ville où un espagnol vous sert un repas indien dans un restaurant «désigné» par un français. Une ville où les gens n’hésitent pas à s’habiller comme ils en ont envie, « en se foutant pas mal du regard oblique des passants honnêtes ». Une ville où des Deschiens boivent des bières avec des Lord Brett Sinclair. Une ville où les femmes de Chelsea sont aussi fières que les hommes d’avoir battu Wimbledon en demi-finale de la Coupe d’Angleterre. Une ville où un japonais peut apprendre l’anglais grâce à un pakistanais qui travaille dans un Mc Do. Une ville où les chauffeurs de taxi de tous âges et de toutes religions laissent traverser les piétons et ne débitent pas dix conneries au kilomètre. Une ville où les « toujours punks » et les « post-baba cools » vivent en harmonie autour du joint de l’amitié rigolarde. Une ville où l’on se moque de tout à commencer par soi-même.
Alors messieurs Le Pen, Mégret et consorts (en deux mots), prenez-en de la graine. La prochaine fois que vous viendrez à Londres, si l’on vous y accepte, n’oubliez pas de vous munir du sac en papier se trouvant près de votre siège d’avion. Il pourrait bien vous être utile lors de votre visite. Au détour d’une rue, vers Portobello, devant tant de bonheurs métissés, vous pourriez avoir envie de vomir.

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