vendredi 11 mai 2007

Placards d’or (suite).

La quatrième place est réservée aux « Enfants du Paradis » de Marcel Carné sur un scénario de Jacques Prévert.
J’ai l’air de radoter mais, comme pour « La nuit du chasseur », ce film a été décortiqué par beaucoup plus de critiques intelligents qu’il n’y avait de députés socialistes dans l’hémicycle pour s’élever contre une loi Sarkozy en première lecture.
Courrez le voir ou le revoir, c’est trois heures de poésie et de bonheur.
Si seulement l’évocation de ce chef d’oeuvre donnait envie à au moins une personne de lire ou relire n’importe quel livre de Prévert, je serais ravie de cet hommage au plus chouette écrivain français de ce siècle.

La troisième place revient à « La vie est belle » de Frank Capra.
Ne pas aimer les films de Frank Capra peut, à mon avis relever de l’enfermement psychiatrique pour haine inguérissable de l’homme. Ces films sont si justes, si beaux, si drôles et si émouvants qu’ils ne laissent normalement pas indifférent. Il y a toujours dans les films de Capra, un personnage en quête d’absolu, un absolu d’amour, de tolérance et d’accomplissement de soi, une recherche de vie réussie sur cette terre. Capra est un philosophe humaniste doublé d’un conteur hors pair. Un mélange d’Hermann Hesse et d’Andersen qui aurait vu tous les films de Chaplin.
Dans « La vie est belle », James Stewart, en tentant de se suicider, va faire la rencontre de son ange gardien. Ce dernier va lui montrer combien sa présence sur terre est indispensable pour ceux qui l’entourent. La scène de fin est si réussie que je pleure à chaque fois.
Cette parabole sur le bien et le mal est un vrai cours d’instruction civique. A côté, « Les ailes du désir » de Wim Wenders ressemblent à un chewing-gum sans goût qu’on aurait mâchouillé pendant des heures.
Tous les films de Capra sont beaux. Voilà c’est tout.

J’ai choisi de donner la deuxième place à « Voyage au bout de l’enfer » de Michael Cimino. C’est un film sur la guerre avec peu d’images de guerre. C’est un film sur l’amitié entre des hommes. Des hommes qui vont à la chasse et qui vont à la guerre. Des hommes qui jouent à mourir au Viêt-Nam et qui reviennent détruits, le cerveau comme passé au napalm. C’est bouleversant comme le mariage du début et l’ultime roulette russe de la fin. Si Besson est l’américain du cinéma européen alors Cimino est l’européen du cinéma américain. Au générique de ce film coup de poing au cœur et au ventre on trouvait: Robert de Niro, John Cazale, John Savage, Christopher Walken et Meryl Streep. Ca dure trois heures et ça les vaut.

Et le Placard d’or est décerné à ...
Rendez-vous demain.





Il y a 10 ans
Dimanche, 11 mai 1997
Temesta.

Insomniaques de tous les pays vous êtes sauvés. Réjouissez-vous, plus de cachets et pilules en tous genres.
Allez dès demain vous acheter un bon gros oreiller en plume d’oie. Finis les angoisses et les petits bruits obsédants de la nuit, désormais votre sommeil sera juste et bon. Ce remède n’est pas un truc de charlatan façon Morphéa de l’Abbé J’m’endors. Il ne s’agit pas non plus de compter les moutons et leurs clones, ni les cons ou les mises en examen des industriels français.
Rendez-vous dans votre vidéothèque préférée et achetez la collection complète des œuvres d’Ingmar Bergman.
Sa filmographie pourra vous permettre de vous endormir de façon différente chaque jour pendant un mois.
J’ai expérimenté cette médecine douce il y a déjà longtemps, quand, à mes retours du pensionnat, je me plantais chaque vendredi devant mon écran de télé pour regarder le ciné-club de Claude-Jean Philippe.
Quand la programmation était Bergmanienne je m’endormais systématiquement pendant la première demi-heure. Mes meilleurs sommeils, je les ai dus au « Septième Sceau », aux « Fraises sauvages » et à « Personna ».
Ma mère venait me réveiller au milieu de la nuit quand la télé pleine de neige éclairait pâlotement le salon.
Certains esprits perfides vous diront qu’une décoction de Rohmer, Téchiné, ou Wenders fera le même effet. Je veux bien les croire. Si aucun de ces cinéastes ne fonctionnent, passez à la drogue dure façon Rivette. Sinon, mais là votre cas est désespéré, relisez ce livre depuis le début sans respirer.

Post-scriptum: Pourquoi le Festival de Cannes honore-t-il ce suédois soporifique d’une Palme des Palmes? S’il ne l’a pas fait par le passé, à la bonne date de fraîcheur des films, c’est qu’il y avait une raison. La peur de voir mourir le bonhomme sans récompense a peut-être poussé ces messieurs bien pensants à sortir de leur manche ce trophée limite posthume.

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