lundi 21 janvier 2008

Rouge de honte.

Dans 200 jours la planète sport sera rouge. Toute rouge. Uniformément rouge.
Le 8 août 2008 s’ouvriront les Jeux Olympiques de Pékin, les 29èmes de l’ère moderne.
Des jeux qui seront parfaitement organisés ; tout est d’ailleurs déjà prêt.
Des jeux qui seront polis et souriants. Depuis quelques mois, les autorités donnent même des cours de sourire aux chauffeurs de taxis et des formations continues aux supporters pour apprendre à applaudir et à mettre de l’ambiance dans les stades. La spontanéité codifiée, on aura tout vu.
Mais des jeux qui feront tout pour masquer la pauvreté, la soumission, le malheur d’un peuple qui, dans sa grande majorité est brisé par ce néocapitalisme rougeoyant de gloire.
Les opposants sont emprisonnés jour après jour. Le régime « communiste » (encore !) a une peur bleue des contacts potentiels entre les 10000 journalistes qui seront sur place et ceux qui voudront témoigner sur leurs conditions de simples citoyens.
En 2001, quand la commission d’évaluation des candidatures était passée à Pékin, les autorités avaient, sur le parcours des officiels, repeint l’herbe en vert et bâti des faux décors de cinéma afin de cacher la misère de certains quartiers.
Des Jeux en trompe l’œil. Des jeux à la gloire d’un régime peu glorieux. Des Jeux pollués dans les têtes et dans les airs. L’équipe de dressage suisse vient de décider de boycotter ces JO en estimant que la santé de ses chevaux n’était pas garantie. Quand on sait que pour palier à ce problème les organisateurs avaient délocalisé la compétition d’équitation à Hong Kong, sous des cieux plus cléments, on peut se demander dans quelles conditions évolueront les athlètes du monde entier dans la capitale chinoise ?
Mais est-ce que cela a vraiment de l’importance ?
Hu Jia, 34 ans, a été arrêté le 27 décembre pour "incitation à la subversion" après avoir critiqué le régime et les JO. Cette accusation peut le faire croupir plusieurs années en prison.




Il y a 10 ans
Mercredi, 21 janvier 1998.
Le cauchemar de Le Pen.

« Ils sont partout, ils sont partout ... ».
Tel le somnambule moyen, Jean-Marie Le Pen erre entre les menhirs de Carnac. Sa chemise vole au vent de Suroît comme si l’Ankou n’était pas loin. Jean-Marie gémit, s’époumone en tentant de vaincre le bruit des vagues et des arbres.
« Ils sont partout, ils sont partout ... ».
La peur de disparaître le tenaille. Des ténèbres, il voit surgir des ombres multicolores. Soudain, une main l’agrippe. Il se retourne. Un japonais jovial l’éblouit avec son flash stroboscopique. Jean-Marie s’enfuit sur la lande. Les ajoncs lui griffent les mollets.
Il trébuche. Il saigne. Il veut crier. Aucun son ne sort de sa bouche, lui le tribun du FN. Il n’a plus de langue.
Par terre, le nez dans la bruyère il entend des voix qui parlent chacune une langue étrangère. Une main se tend pour l’aider à se relever. Il pense à ses faux amis du Parti, Bruno et Bruno. Mais où sont-ils?
« Appelez la milice de Vitrolles ou de Vichy qu’on en finisse », essaye-t-il de crier, en vain.
Un visage se penche vers lui, celui d’un Tunisien. Angoisse. Sur le visage du Tunisien se superposent celui d’un Camerounais, puis celui d’un Italien, d’un Russe, d’un Israélien, d’un Chinois, d’un Américain, d’un Turc, d’un Portoricain, d’un Indien et ainsi de suite comme dans un clip ultrarapide de Michael Jackson. La dernière image qu’aperçoit Jean-Marie avant de sombrer dans l’inconscience est celui du Japonais rieur et photographe.
« Ils sont partout, ils sont partout ... »
Gelé et en sueur, Jean-Marie ne sait plus où il habite.
Il se réveille, sort de son lit avec difficulté et pose le pied sur un journal qui traîne par terre. A la Une du quotidien on peut lire:
« Il y a eu 67 millions de touristes étrangers en France en 1997 ».

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